Dernière mise à jour: 21 novembre 2023

Alors que de plus en plus de thérapeutes passent à des rôles d’accès direct, peu d’études ont analysé l’impact de ce rôle sur le recours à l’imagerie médicale en physiothérapie de première ligne. Nos travaux démontrent que les physiothérapeutes peuvent faire un usage judicieux des ressources dans leur rôle de prescripteur tout en respectant les bonnes pratiques.

Même si des progrès significatifs ont été réalisés pour la mise en œuvre de corridors de services en accès direct en physiothérapie aux États-Unis, la prescription d’imagerie diagnostique par les physiothérapeutes demeure somme toute assez rare.

La prescription d’imagerie diagnostique par les physiothérapeutes est maintenant implantée dans plusieurs pays, dont l’Australie, le Canada, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Norvège et l’Afrique du Sud. Les physiothérapeutes de l’armée américaine ont aussi le privilège d’effectuer directement des examens d’imagerie depuis des dizaines d’années, mais ce privilège n’est pas exercé par les professionnels de la société civile.

En 2010, près de 100 milliards de dollars ont été dépensés rien que pour l’imagerie médicale. L’orientation inappropriée des médecins vers l’imagerie diagnostique pour les lombalgies a été identifiée comme l’un des cinq principaux domaines à traiter qui aurait le plus grand impact sur l’amélioration des soins et la réduction des coûts.

Notre projet

Notre équipe de recherche a donc voulu examiner la pertinence du recours à l’imagerie pour les physiothérapeutes œuvrant dans un centre médical universitaire. Nous avons collecté des données sur la pertinence des examens, ainsi que sur le taux de remboursement et de prescription d’une radiographie lors de l’évaluation initiale en physiothérapie. L’étude visait notamment à déterminer dans quelle mesures les physiothérapeutes respectent les lignes directrices de l’Association américaine de radiologie (ACR) lorsqu’ils prescrivent des radiographies.

Pour ce faire, nous avons examiné le dossier médical électronique de patients qui ont été vus au Medstar Georgetown University Hospital de Washington par 10 physiothérapeutes sur une période de 5 ans et pour lesquels un examen diagnostic a été prescrit suite à l’évaluation initiale. Ce milieu était particulièrement intéressant parce que les professionnels du département jouissent d’un droit de prescription illimité après une formation donnée à l’interne auprès de radiologistes.

Les résultats de l’examen clinique et les antécédents du patient ont été communiqués à un radiologue qui a ensuite appliqué les critères de pertinence de l’American College of Radiology pour déterminer la pertinence de l’examen. Le radiologue a classé les références comme « appropriées » ou « inappropriées » selon les critères de pertinence de l’ACR.

La prescription d’imagerie par les physiothérapeutes

Nos résultats sont très encourageants et démontrent que les physiothérapeutes peuvent faire preuve d’une utilisation appropriée de l’imagerie diagnostique dans la grande majorité des cas. Ils ont été judicieux dans leur utilisation de l’imagerie dans plus de 91% des 108 examens d’imagerie et aucune problématique au niveau du remboursement des examens n’a de plus été notée.

Il y a eu 69 radiographies et 39 examens d’imagerie avancée (35 IRM, 1 IRM et 3 tomodensitométries). Certains patients ont été orientés vers des examens pour différentes pathologies au cours de différents épisodes de soins, tandis que d’autres ont été orientés plusieurs fois vers des examens pour la même pathologie. Par exemple, des radiographies répétées ou des IRM de suivi ont été demandées pour des patients présentant une forte suspicion de pathologie qui n’apparaissait pas initialement sur les images.

La plupart des radiographies visaient la hanche/le bassin (33%) et la cheville/le pied (16%), tandis que la colonne lombaire était la région du corps la plus souvent visualisée par IRM (36%).

Il semble aussi que les physiothérapeutes réfèrent relativement peu en radiologie suite à l’évaluation initiale, puisque seulement 9% des personnes évaluée en physiothérapie ont été référées pour une radiographie simple et seulement 4 % pour un autre type d’imagerie. Qui plus est, l’ensembles des examens prescrits en physiothérapie a été remboursé par les assureurs.

Un petit échantillon

Il faut toutefois mentionner que nos travaux ont été limités à 10 physiothérapeutes qui travaillaient dans une seule clinique. Ces derniers avaient en moyenne 13 ans d’expérience et ils étaient certifiés par l’American Board of Physical Therapy Specialists dans le domaine du sport ou de l’orthopédie. Ce profil particulier pourrait avoir eu une grande influence sur nos résultats et il serait intéressant d’évaluer les paramètres de prescription de radiographie avec différents profils de physiothérapeutes afin d’identifier les facteurs qui optimisent l’adoption des meilleures pratiques.

Nous n’avons pas non plus évalué l’impact éventuel de la formation continue sur la prise de décision liée à l’imagerie. Cette dernière pourrait avoir influencé grandement la décision ou non d’avoir recours à la radiographie lors de l’évaluation initiale. Dans les cas où le physiothérapeute excluait une pathologie spécifique en dehors du champ de la physiothérapie, nous n’avons pas évalué la précision diagnostique du clinicien pour ce type de pathologies.

Nos travaux peuvent éclairer les physiothérapeutes et les administrateurs intéressés par l’acquisition de droits de prescription d’imagerie diagnostique, mais il serait intéressant de déterminer la formation minimale requise pour que les physiothérapeutes puissent prescrire efficacement des examens diagnostiques dans le champ de la physiothérapie.

L’équipe de recherche tient à remercier Sameer et Mehta et Brian Baranyi pour leur contribution aux travaux ainsi que l’OPPQ pour son programme de bourses et subventions.

Messages clés

  • Les physiothérapeutes peuvent faire preuve d’une utilisation appropriée de l’imagerie diagnostique dans la grande majorité des cas;
  • Les physiothérapeutes réfèreraient relativement peu en radiologie suite à l’évaluation initiale.

Pour consulter l’étude complète:

Keil AP, Baranyi B, Mehta S, Maurer A. Ordering of Diagnostic Imaging by Physical Therapists: A 5-Year Retrospective Practice Analysis. Phys Ther. 2019 Aug 1;99(8):1020-1026. doi: 10.1093/ptj/pzz015. PMID: 30715477.; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30715477/

Références

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2. de Gruchy A, Granger C, Gorelik A. Physical therapists as primary practitioners in the emergency department: six-month prospective practice analysis. Phys Ther. 2015;95:1207–1216.
3. Lebec MT, Jogodka CE. The physical therapist as a musculoskeletal specialist in the emergency department. J Orthop Sports Phys Ther. 2009;39:221–229.
4. Fleming-McDonnell D, Czuppon S, Deusinger SS, Deusinger RH. Physical therapy in the emergency department: development of a novel practice venue. Phys Ther. 2010;90:420–426.

A.P. Keil, PT, DPT, Department of Physical Therapy, University of Illinois at Chicago College of Applied Health Sciences, Chicago, IL 60612 (USA). Address all correspondence to Mr Keil at: aaronkeil@hotmail.com.

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